Echoes of elegance and manipulation

Dans les profondeurs de l'imposant bâtiment, où se discutaient la majorité des intérêts publiques, une atmosphère chargée de tension électrisait l'air. La pièce où se tenait la réunion était une salle majestueuse, dont les hauts plafonds ornés de lustres projetaient sur ces murs d'inquiétantes ombres. Elles appartenaient à des centaines d'hommes agités, aux sourcils broussailleux qui se fronçaient face aux discours scandaleux, aux plis d'un visage ridé où se lisait une vie d'opulence qui se crispaient. Les portraits solennels d'anciens bâtisseurs du territoire de la Californie encadraient la scène. Ils étaient les silencieux témoins des débats enflammés qui animaient la pièce, où jadis eux-mêmes se tenaient fièrement debout au milieu de la salle.

Ce soir, la parole était donnée à Ferdinand Stanford, du moins en surface. Il était assis sur un large siège au centre, scrutant les vautours républicains se dressant face à lui, bien heureux d'avoir l'opportunité de faire couler un éminent membre du parti adverse. Le sénateur Caldwell parlait en marchant dans un cercle défini ; son discours semblait avoir particulièrement bien été travaillé dans l'espoir de descendre le gouverneur. Celui-ci savait quand ses talents d'orateur étaient requis et il était de notoriété publique que monsieur Stanford n'avait pas sa langue dans sa poche. Ferdinand observait avec attention les traîtres dans la salle et tandis qu'il jaugea la foule, son regard croisa son propre père qui se frayait un passage jusqu'à lui. Arrivé jusqu'à son uniques fils, il se tenait alors à sa droite, montrant fièrement de quel côté il était.

Sénateur Caldwell, commença Ferdinand qui était assis tranquillement, les jambes croisées attestant de sa parfaite maîtrise en surface de la situation. Dois-je vous rappeler que ma signature a été utilisé contre ma volonté ? Je sais que la décision de gracier Horace Hudson dans ces circonstances est difficile à comprendre, mais vous n'y étiez pas. Son regard se fit glacial. J'étais confronté à des menaces sérieuses contre ma vie et celle de ma famille. Si Mr. Hanson n'avait pas fait ce qu'il a fait, je ne serai pas là à écouter votre point de vue qui n'a pas lieu d'être.
Le sénateur blêmit alors qu'il observa celui qu'il estimait être un vaurien de démocrate. Il n'avait pas l'intention de laisser Ferdinand s'autoproclamer victime de cette histoire !
Gouverneur, je comprends la pression que vous avez subie. Ferdinand rit intérieurement, Caldwell disait "comprendre" ! Il n'avait jamais été dans une situation semblable, comment osait-il l'insulter aussi ouvertement en affirmant comprendre quoique ce soit ? Mais permettre à un criminel d'échapper à la justice sous la menace ne peut être justifié. Cela crée un précédent dangereux.
D'un bond, Ferdinand se leva. Dans la salle, les partisants démocrates étaient choqués d'aussi peu de compassion de la part du sénateur. Les murmures allaient crescendo tandis que le Gouverneur fit un pas vers Caldwell.
Ma femme est enceinte, gronda-t-il pour que l'assemblée l'entende sans difficulté. Elle a été gravement blessée. Deux de mes domestiques ont connu une mort barbare. Et vous me dites, sans aucune honte, que j'aurai dû ne pas céder au chantage ?! La fin de sa phrase avait été criée, scandée, son index pointé sur le sénateur avec un dédain certain. Ils ne l'auront pas aujourd'hui, non ! Ferdinand n'était pas arrivé si loin par pure chance, l'échiquier de la vie lui octroyait des coups d'avance.

La barbe grise du sénateur frémissait. L'homme d'un âge mûr avisa les plaintes de l'assemblée, la moitié d'elle le huant et l'autre le supportant. Afin de retrouver un semblant de calme, un marteau était frénétiquement cogné sur la suface d'un socle, ordonnant le silence. Ce n'était pas un tribunal, non, mais ils firent tout pour que Ferdinand Stanford se sente jugé et oppressé. Mais ce n'était pas à un homme comme lui qu'on arrivait facilement à faire trembler comme une feuille avecu n peu de subterfuge, lui qui avait essuyé plusieurs atteinte à sa vie en l'espace de quelques mois.
Mais maintenant, Gouverneur Stanford, ce hors-la-loi est intouchable par votre faute, rajouta-t-il de son air supérieur. Comment pouvons-nous maintenir l'ordre et la sécurité si les criminels savent qu'ils peuvent faire chanter les autorités ? Les billes émeraudes au fond de ses orbites reluquaient Caldwell avec haine. Ce type n'avait que faire de Victoria, de son héritier. Il montrait son indifférence avec une fierté non dissimulée, persuadé d'être en sécurité dans cette salle remplie. Pour Ferdinand, ça avait toujours été clair ; ceux qui n'étaient pas avec lui, étaient contre lui. Mais il devait rester maître de son propre corps pour ne pas donner raison à qui que ce soit. Son père en était témoin, un pas derrière lui.
Je ne prends pas cette situation à la légère. J'examine toutes les options pour rétablir l'ordre tout en préservant la vie de ceux qui sont en danger.
Le sénateur pouffa d'un rire volontairement moqueur, attisant celui de ses amis cachés dans la foule. Ferdinand lança un regard par-dessus son épaule, cherchant l'appui de ses propres acolytes, puis continua sans relever l'irrespect. Pour l'instant. Je trouverai un moyen de rectifier cette situation sans compromettre l'intégrité de notre système judiciaire, sénateur Caldwell. Après tout, un démocrate n'aime-t-il pas son pays plus qu'un républicain ? A son tour il sourit, sa fine remarque sarcastique et insultante arrachant les regards outrés du parti adverse, qui cherchait à le renverser pour faire élire un gouverneur parmi leur membre.
Vous êtes bien connu, Gouverneur, pour savoir tirer votre épingle du jeu. Mais cette fois, vous...
Je n'ai pas fini, le coupa Ferdinand. Donc, et là il commença à faire les cents pas en s'adressant directement à l'Assemblée, plusieurs moyens de corriger cette fâcheuse situation s'offre à moi. Il fit exprès de jouer sur ce mot pour signifier qu'il comprenait être le seul responsable et que cette affaire, il s'en occuperait lui-même.

La grâce accordée lave monsieur Hudson de ses pêchés, certes. Et il ne peut plus être condamné pour ça. Mais un rat restera toujours un rat, non ? A cela il lança un regard entendu au sénateur. Le naturel revient toujours. Ce criminel n'arrêtera jamais de commettre des délits, sauf qu'il s'y prendra plus discrètement. Il tourna sur lui-même pour rebrousser chemin, sa gestuelle aisée et sa voix claire captant l'attention générale. Son charisme faisait toujours effet, qu'on le déteste ou non. C'est pour quoi je ferai appel aux grands moyens : l'armée, les forces de l'ordre locales et la Pinkerton seront réquisitionnées pour retrouver ces hors-la-loi et débuter une surveillance accrue. Pour le prendre en flagrand délit et l'inculper aussitôt.

Le bourdonnement côté républicain s'intensifia, ils ne s'étaient pas attendus à ce que Ferdinand ait de quoi répondre aux pièges tendus qui visaient à accuser sa soi-disante "incompétence". Vous avez toujours réponse à tout, n'est-ce pas ? répliqua Caldwell. Mais que ferez-vous si rien de tout ça ne fonctionne comme vous l'espérez ?

Le Gouverneur, vêtu de son impeccable redingote noire, fixait le sénateur avec un sourire en coin. Le dernier recours pourrait être l'amendement de la grâce.